Pour faire face aux défis éthiques, environnementaux et humains qui lui sont lancés, le monde a un besoin urgent de poésie. Au long de quelques saisons, Jean Désy a échangé sur cette idée avec des personnes chères à son cœur, des poètes, des peintres, des artistes dans l’âme. Avec le présent livre, il nous invite à prendre place à leurs côtés, pour mieux nous immerger dans leurs pensées qui vagabondent, errent et se rencontrent.
Ce livre est vraiment magnifique, je le trouve tellement beau à cause de toutes les idées qu’il apporte. En ayant le livre entre les mains et en découvrant qu’il s’agissait d’entretiens, je me suis demandé si ce livre me plairait. C’est un livre que j’ai pris le temps de lire. Je pense que c’est la meilleure façon de le lire: lentement. De prendre le temps de découvrir la discussion entre Jean Désy et les artistes. De savourer les textes et des réflexions qui nous apportent beaucoup.
« Au bout de la noirceur, il peut y avoir retour à la lumière. Grâce à la poésie, même si la noirceur persiste, on atteint parfois un grand calme. Simplement le fait d’avoir osé toucher à la noirceur peut apporter une sensation de paix. Certains poètes sautent ainsi à pieds joints dans la pleine noirceur. »
Au début de l’ouvrage, une petite introduction explique la démarche de l’auteur. Jean Désy invite des poètes à venir parler avec lui: ils sont écrivains, slameurs, artistes visuels, musiciens, danseurs, cinéastes, médecins, psychologues, etc. Il les invite à la discussion, dans sa cabane dans le Nord. Une grande partie du livre se déroule en hiver. Il prend le temps de se promener en forêt et de discuter avec son invité. Parfois il invite les gens à des activités en groupe comme lorsqu’il y amène ses étudiants. Le décor fabuleux est propice à faire vivre la poésie. On sent aussi que l’auteur est passionné par son sujet.
Une question est au centre de l’ouvrage: dans notre monde d’aujourd’hui de plus en plus difficile, de plus en plus rapide, où la nature est de moins en moins présente, où il y a de moins en moins d’espace pour penser, réfléchir et prendre le temps, est-ce donc possible de vivre sans poéticité? Avons-nous intérêt à nous tourner de plus en plus vers la poésie? C’est la grande question du livre. C’est à cette interrogation que tenteront de répondre Jean Désy et les gens avec qui il s’entretient.
« On entre en poéticité comme on entre en contact avec son fils, sa fille, son frère ou sa sœur. On entre en poéticité comme on entre en contact avec un animal, une plante ou une pierre. L’air des plus hauts sommets de la terre comme celui des plaines contribue à la poésie du monde. Rares sont les poètes qui n’ont pas senti un jour que des ailes leur poussaient afin qu’ils puissent voler avec les oiseaux. »
De plus en plus avec les changements climatiques, la déforestation, l’exode vers les villes, la maladie mentale, le réchauffement climatique, les guerres et le type de société dans laquelle on vit, le quotidien est de plus en plus difficile pour beaucoup de gens. On aurait intérêt à promouvoir la poéticité au quotidien. De mettre en lumière l’importance de prendre plus de temps pour s’émerveiller de la nature et de ce qui nous entoure.
Jean Désy pose des questions autour de la poéticité lors de ses entretiens. Chaque artiste avec qui il discute donne son ressenti sur le sujet. Certaines questions reviennent plus souvent, mais les réponses varient. La façon dont chacun vit la poéticité change d’une personne à l’autre. Jean Désy présente aussi des questions plus spécifiques selon les domaines d’emploi ou la personnalité des gens avec qui il discute. Ce sont d’ailleurs de très beaux échanges, vraiment intéressants à découvrir. C’est un livre que l’on prend plaisir à lire par petites touches. Je lisais deux ou trois entrevues par jour. J’avais alors le temps de bien assimiler l’échange et de me donner de l’espace pour y réfléchir et en discuter avec mes proches.
Ce livre-là va probablement changer ma façon de visualiser et d’aborder les prochains recueils de poésie que je lirai. Chaque artiste qui discute avec Jean Désy a une vision différente de la poésie, une façon unique et bien à lui ou à elle de nous la faire comprendre. Quand on va chercher toutes ces visions, ça donne une nouvelle façon de voir la poéticité au quotidien.
« Les poètes sont comme des jardiniers. Il y a aussi un rapport avec la magie aussi. J’ai compris qu’on peut entendre le même texte une fois, deux fois, trois fois, et qu’on ne le recevra jamais de la même façon. »
J’adore le fait que beaucoup de questions et de réponses tournent autour de la nature. Chacun perçoit ce qu’il vit de façon différente. Tout comme pour la poéticité, qui donnera une couleur unique à un texte, une chanson, une musique, une chorégraphie ou un tableau. Chaque artiste parle de sa façon de travailler, d’accueillir la poésie et de la partager dans ses œuvres. Chacun aborde aussi sa façon de recevoir la poésie des autres. Ce peut être un bon livre pour appréhender la poésie et avoir envie de la découvrir, d’en lire ou d’en écrire. C’est un livre très inspirant pour vivre la poésie et la transmettre aux autres.
Les questions que l’on retrouve dans cet ouvrage sont d’une grande pertinence et même si je ne connaissais pas tous ceux avec qui Jean Désy s’entretient, sa façon de questionner les gens sur la poésie nous donne envie d’en savoir plus, de découvrir ce que la personne questionnée a à apporter. On a envie de découvrir toutes leurs œuvres. Ce livre nous amène à se renseigner sur ces artistes, à s’intéresser à leur travail, à découvrir des artistes de chez nous. Un autre côté qui apporte une grande richesse au livre. On apprend dans quel contexte se placent les artistes qui créent. On en apprend plus sur leur état d’esprit, sur qui ils sont et de quelle façon on peut mieux aborder la poésie. Notre rapport à la poésie est différent d’un à l’autre. Leurs visions nous permettent de découvrir de nouvelles façons d’accueillir la poésie.
Nous sommes poésie est un ouvrage riche en réflexions et en découvertes. Je crois que ce livre pourrait amener les gens qui ne lisent pas de poésie, soit parce qu’ils la trouvent hermétique ou parce qu’ils ne savent pas comment l’aborder, à la percevoir différemment. Naturellement, la poésie, ou plutôt la poéticité, n’est pas seulement restreinte à la lecture. C’est plus profond que cela. La poésie est dans notre vie de tous les jours. On la retrouve dans l’art, dans la musique, dans l’écriture, dans la photographie. La poésie dans nos vies. La poésie qui amène une certaine extase pour qui en profite. C’est avec cet ouvrage que je découvre et lis Jean Désy pour la première fois. Je trouve son propos intelligent, ses réflexions et celles des artistes sont très pertinentes dans notre vie d’aujourd’hui. Ses questionnements amènent une réflexion essentielle sur la place de la poésie dans nos vies. Sur ce qu’elle nous apporte.
Par ce livre, Jean Désy permet au lecteur de découvrir plusieurs artistes. Pour faciliter notre rencontre avec chacun des participants, une notice biographique à la fin raconte leur histoire et parle de leur travail. C’est donc plus facile de retracer ce qui nous a plu et de poursuivre la découverte de ces artistes et de leurs œuvres.
Ce livre est une grande surprise, car je ne m’attendais pas à aimer autant cet ouvrage. Mais c’est surtout un grand grand coup de cœur qui m’a apporté beaucoup pendant ma lecture et qui continuera de me faire réfléchir dans l’avenir. Un très grand plaisir de lecture.
Nous sommes poésie, Jean Désy, éditions XYZ, 280 pages, 2022