Sal mène une vie paisible et sans histoires, dans une famille moitié mexicaine, moitié américaine. Mais tout bascule le jour de sa rentrée en terminale. Pour défendre l’honneur de son père adoptif, il sort les poings et frappe. Surprise, colère, satisfaction, culpabilité se bousculent dans la tête du jeune homme, qui se met à douter de tout, même de sa propre identité. Alors, avec l’aide de Sam, sa meilleure amie, et de son père, Sal va tenter de comprendre l’insaisissable logique de sa vie.
Ce que j’ai pu aimer ce roman! Il m’a fait vivre toute une gamme d’émotions. J’ai ri, j’ai pleuré, j’ai été émue, j’ai souri et le livre m’a fait réfléchir. En tournant la dernière page, je me suis rappelée pourquoi j’avais tant aimé Aristote et Dante du même auteur et pourquoi, Benjamin Alire Sáenz est sans doute l’un des auteurs pour la jeunesse qui me parle le plus.
Son talent est définitivement d’aborder des sujets graves – les thématiques LGBT, le deuil, les ruptures, l’amour et ses sentiments si forts, la drogue, l’alcool, la mort, l’adoption, la recherche de soi-même – tout en écrivant un roman qui est aussi réconfortant. Qui fait du bien. Qui agit un peu comme un baume. Parce que la vie, c’est tout ça à la fois. Du beau, du plus difficile, des gens qui en valent la peine et des moments qui sont de vrais instants de bonheur. C’est ce que j’aime chez cet écrivain. Il montre que la vie, même la plus dure, peut avoir des moments de pure lumière. Il met en scène des adolescents pas comme les autres, parle énormément des mots, de leur pouvoir, des langues et ses personnages sont intéressants. La dualité entre la culture blanche américaine et la culture mexicaine est souvent abordée dans ses livres. L’auteur aborde les thèmes reliés à l’identité. Il écrit des romans jeunesse intelligents et sensibles.
L’insaisissable logique de ma vie parle d’un jeune homme de dix-sept ans qui a été adopté tout petit, Salvadore. Appelé aussi Sal, Sally (qu’il déteste!) et Salvie, selon les gens qui s’adressent à lui. Il vit avec son père, Vicente, qui l’a adopté bébé. Sal mène une vie plutôt tranquille avec son père. Il a une meilleure amie, Sam, une grand-mère qu’il adore et une famille mexicaine géniale qui aime faire des repas en famille et manger. Ils m’ont d’ailleurs donné faim avec leurs tacos et leurs tortillas (j’aime la cuisine mexicaine!)
Les choses se mettent à débouler dans sa vie quand quelqu’un insulte son père à l’école et que Sal décide de se battre, ce qui lui arrive ensuite de plus en plus souvent. Il reçoit aussi une étrange lettre qui lui fait remettre en question beaucoup de choses…
« Je savais pourquoi les gens avaient peur de l’avenir. Parce que l’avenir ne ressemblerait pas au passé. C’était effrayant. »
Ce roman se lit presque d’une traite. Les chapitres sont courts, il se passe beaucoup de choses dans la vie de Sal que lui-même ne comprend pas. Comme dans Aristote et Dante, le roman raconte la recherche et la compréhension de soi-même. Dans le cas de Sal, enfant blanc, adopté, vivant dans une famille mexicaine, beaucoup de questions surgissent alors qu’il ne comprend plus son comportement, ses excès de colère et qu’il se demande s’il n’est pas en train de devenir comme son père biologique qu’il ne connaît pas.
Entre ce que lui-même vit, ce que son père et son copain Marcos vivent et ce que ses amis, Sam et Fito doivent traverser, Sal apprend à grandir et à se comprendre. Il cherche un sens à sa vie et cherche surtout à en comprendre la logique.
« Y a-t-il jamais un bon moment pour quoi que ce soit? Vivre est un art, pas une science. »
Le roman m’a plu parce qu’en plus de l’histoire, il y a de beaux personnages et de beaux moments dans ce livre. Les mots sont importants et entre Sal et Sam, les mots ont une grande histoire. Une histoire d’amour. Parce que les mots sont puissants. Les jeunes s’envoient chaque jour un « MDJ » (Mot Du Jour) afin de partager leurs émotions et ce qu’ils vivent.
« Les mots n’existent qu’en théorie. Et un jour, on tombe nez à nez avec un mot pour de vrai. Et alors, ce mot devient une personne que l’on connaît. Ce mot devient une personne que l’on déteste. Et on emporte ce mot avec soi, où qu’on aille. Et on ne peut pas faire comme s’il n’existait pas. »
Il y a également de belles choses dans la famille que deviendront Sal et son père. S’ils vivent à deux au départ, plusieurs autres personnages vont se greffer à leur univers au fil du temps et j’ai trouvé que c’était amené avec une grande sensibilité et beaucoup d’humanité. Pour couronner le tout, un petit plus bien personnel, parce que moi ça me plaît toujours beaucoup: le livre se déroule pendant la période de l’automne à l’hiver et nous vivons avec les personnages toutes les Fêtes, de l’Halloween à Thanksgiving, en passant par Noël.
J’ai eu un gros coup de cœur pour cette histoire qui parle d’homoparentalité, d’amitié, de deuil et aussi d’amour (mais pas l’amour auquel on pense en premier). C’est un roman bien écrit, dans lequel on plonge avec plaisir. Difficile de ne pas être sensible à l’univers de Sal, Sam et Fito. Et que dire de Vicente, un père exceptionnel! Pas parfait, mais à l’écoute, intelligent et incroyable. On l’aime tout de suite! Un très beau personnage, vraiment!
L’univers de Sal est remplie de sensibilité. Il aime les étoiles, fait de la course à pied pour aller mieux et apprécie la force et la sonorité des mots. Je me suis retrouvée dans ces détails qui rendent l’histoire tellement plus dense et intéressante.
Un roman coup de cœur, tout comme l’a été Aristote et Dante. Il y a quelque chose dans les livres de Benjamin Alire Sáenz qui fait du bien. Beaucoup de bien. On a envie d’y rester un peu plus longtemps. Ça m’avait fait la même chose avec son premier roman. Si vous ne connaissez pas cet auteur, foncez! Ses livres valent vraiment la peine d’être lus!
L’insaisissable logique de ma vie, Benjamin Alire Sáenz, éditions Pocket Jeunesse, 505 pages, 2018