Six versions t. 1: Les orphelins du Mont Scarclaw

« Bienvenue dans Six Versions, je suis Scott King. Durant six semaines nous reviendrons sur la tragédie du mont Scarclaw. » Un soir d’août, sur les pentes sauvages de la montagne écossaise, Tom Jeffries, quinze ans, disparaît. L’été suivant, son corps est retrouvé dans les marécages. Accident ou crime ? Le doute subsiste. Vingt ans plus tard, dans son célèbre podcast « Six Versions », Scott King donne la parole aux témoins pour tenter de résoudre l’énigme. Les adolescents ont grandi. Ils racontent et leurs souvenirs se contredisent : leur exploration de la mine désaffectée, leur découverte de l’alcool et de la marijuana, l’histoire de Nanna Varech, la créature fantastique qui hanterait ces lieux, leurs jeux cruels avec les habitants les plus étranges du village… Qui dit vrai ?

Les orphelins du Mont Scarclaw est le premier roman de la série Six versions. Cette série m’attirait beaucoup et j’avais très hâte de la découvrir.

Scott King a un balado (podcast) où il revisite certaines affaires criminelles et intrigantes du passé. En 1996, un groupe d’adolescents passe du temps au Mont Scarclaw. L’un d’entre eux, Tom Jeffries, disparaît. Son corps est retrouvé un an plus tard. Est-ce un accident? Un crime? Personne n’a été accusé. L’affaire reste nébuleuse. Scott ouvre à nouveau ce dossier vingt ans plus tard et donne la parole aux témoins de l’époque. Entre les soirées où les jeunes expérimentaient l’alcool et la drogue, les lieux intrigants et mystérieux et les légendes locales, Scott a beaucoup de pistes à creuser.

« Le mal existe, et il existe ici, parmi nous. Nous érigeons des monuments en l’honneur des disparus, nous y gravons le nom de ceux qui ont donné leur vie pour endiguer le mal. Nous n’oublions pas. »

Le format de ce roman (car oui, il s’agit d’un roman) est très original. Retranscrit sous forme de balado, les chapitres correspondent à différents épisodes. On y retrouve les interventions de Scott et les réponses des différents personnages à ses questions. À travers les pages, Scott tente de mieux comprendre les fils d’une affaire qui reste nébuleuse et dont le constat final ne semble pas satisfaisant. Il essaie « d’éclairer les ombres du passé, dépoussiérer de vieilles affaires classées et déterrer des cadavres oubliés ».

L’alternance des dialogues et des chapitres conçus comme des épisodes radiophoniques offrent une lecture qu’on dévore pratiquement d’un coup. On cherche à comprendre cette affaire nous aussi. Le format propose donc une lecture assez rapide, les pages tournent vite et l’histoire se présente finalement comme un très bon thriller.

« La forêt, à l’image de ses habitants, demeure tapie dans l’ombre de la montagne qui se dresse en surplomb, éminence de rocailles noires couronnées de nuages. »

Toute l’originalité de ce roman vient de sa façon d’être raconté et de son format sous forme de balado. Étonnamment, ça passe très bien à l’écrit. Cette lecture m’a donné l’impression réjouissante de me plonger dans un vrai bon podcast criminel. Comme j’en écoute déjà beaucoup, retrouver ce format dans un roman m’a tout d’abord vraiment intriguée. Et finalement, je suis très contente d’avoir pu découvrir ce premier tome. J’ai adoré! J’ai les deux prochains tomes sous la main et je lirai les autres à venir assurément. C’est très bon!

Vous aimez les podcast de true crimes? Ce roman pourrait bien vous plaire!

Six versions t. 1: Les orphelins du Mont Scarclaw, Matt Wesolowski, éditions Les Arènes, 320 pages, 2023

Le garçon aux pieds à l’envers

Disparaître dans un village aussi petit que Saint-Sévère est hautement improbable. Pourtant, en cette journée de canicule, Joey Laforme est introuvable. Adrienne Ferron, 14 ans, est la seule à remarquer l’absence de sa petite voisine, dont les géniteurs d’ailleurs, ne gagneraient jamais le trophée de parents de l’année. Selon sa conception exclusive de l’amitié, Adrienne voit d’abord dans cette disparition un prétexte convaincant pour passer du temps avec son amie Léonie, venue spécialement de la ville afin de l’aider à y voir plus clair. Avec comme seuls indices le sac à dos de Joey et la réception d’étranges textos, les deux amies sont vite persuadées qu’il n’est pas seulement question d’une mauvaise blague : la petite est réellement en danger !

Voilà un livre auquel je ne m’attendais pas et qui m’a tellement happée que je l’ai lu en quelques heures.

Saint-Sévère est un tout petit village. Adrienne a 14 ans. Sa petite voisine Joey, qui venait de lui envoyer un message demandant de l’aide, a disparu. La famille de la petite semble ne pas s’inquiéter qu’elle ne soit plus là. L’auteur aborde à travers le personnage de Joey, le quotidien difficile d’une famille dysfonctionnelle. Adrienne profite de cette disparition pour passer du temps avec sa meilleure amie Léonie. Les filles partent à la recherche de Joey. Un journal trouvé dans le sac à dos abandonné par la fillette et quelques textos étranges leur servent d’indices. Quand un vieil ami d’enfance d’Adrienne surgit et qu’elles font la connaissance sur internet d’un chasseur de démons, cette disparition prend une toute autre tournure…

Cette histoire est étonnante et intrigante, avec l’enquête autour de la disparition de Joey et de la réapparition d’un ami d’Adrienne. Et il y a Corinna qui flâne dans les parages, déçue d’être la troisième amie insignifiante de leur trio. L’auteur avait un don pour raconter les amitiés difficiles et parfois décevantes de l’adolescence, entre les rapports de force, les rivalités et les différences d’âge. C’est un aspect touchant du roman, car il n’est pas toujours facile de se tailler une place dans un groupe d’amis. 

Le roman a aussi un aspect « paranormal » qui frôle parfois la légende. Ça m’a beaucoup plu, parce qu’on veut forcément en savoir plus. C’est intrigant et, mélangé à l’enquête des adolescents, ce roman s’avère finalement très prenant. J’ai beaucoup aimé cette histoire! J’ai apprécié également que le roman se déroule en région et que des passages mettent en scène des textos et des forums de discussion.

« Il se souvint que son destin était de combattre les créatures des ténèbres. »

Je ne m’attarderai pas sur la polémique (que je ne comprends pas) entourant la publication de ce livre et le triste décès de son auteur. J’ajouterai par contre que, pour œuvrer en bibliothèque depuis des années, je suis contre la censure et je me réjouis chaque fois qu’un livre pointé du doigt est emprunté. Les lecteurs, jeunes et moins jeunes, sont intelligents. Les livres sont là pour élargir l’esprit et permettre à chacun de se forger une opinion. J’ai d’ailleurs prêté ce roman la semaine dernière et il a beaucoup plu. Je vous le conseille!

Le garçon aux pieds à l’envers, Les chroniques de Saint-Sévère, François Blais, éditions Fides, 320 pages, 2022

La fête du potiron

Hercule Poirot s’apprêtait à passer une paisible soirée dans son appartement londonien lorsque surgit – venant troubler sa quiétude – son amie, la romancière Ariadne Oliver, dans un état de surexcitation fébrile. Dans une petite agglomération pas très éloignée de Londres, elle a assisté à une réunion pour enfants et adolescents. Or, au cours des réjouissances, une fillette bavarde et menteuse a été sauvagement assassinée. Peu de temps avant de mourir, elle s’était vantée publiquement d’avoir assisté à un meurtre, des années plus tôt. Mrs Oliver supplie Poirot d’aller à Woodleigh Common pour tenter d’élucider les raisons de ce meurtre et d’en découvrir le coupable. Le célèbre détective accepte et à peine arrivé dans la paisible bourgade, il s’apercevra que cette paix n’est que d’apparence.

La fête du potiron d’Agatha Christie a aussi pour titre Le crime d’Halloween dans les éditions plus récentes. Mon exemplaire date de 1973. J’étais contente de mettre la main dessus car c’est cette édition que j’avais lue pour la première fois à l’adolescence (et relue deux fois depuis). J’ai été voir l’adaptation qui passe au cinéma présentement, Mystère à Venise, que j’ai beaucoup aimé. J’apprécie les adaptations des intrigues d’Agatha Christie que Kenneth Branagh reprend depuis quelques années.  J’avais donc envie de relire le livre. Il faut savoir que si j’ai beaucoup aimé le film, tout comme le livre, il s’agit de deux histoires fort différentes.

Hercule Poirot est appelé dans un petit village par son amie, la romancière Ariadne Oliver. Lors d’une fête pour enfant organisée pour l’Halloween, une adolescente est retrouvée morte noyée dans une bassine d’eau et de pommes préparée pour un jeu. Elle a été assassinée. Aux dires de tous, c’était une menteuse trop bavarde. Elle venait justement d’avouer, un peu avant sa mort, avoir été témoin d’un meurtre. Le criminel l’aurait-il éliminée pour s’assurer son silence? Dans ce paisible village où tout le monde se connaît, Hercule Poirot s’aperçoit vite que les apparences sont bien trompeuses…

C’est toujours un grand plaisir de retrouver Agatha Christie, ça faisait si longtemps! Cette relecture me donne envie d’en lire d’autres d’ailleurs. C’est toujours un petit plaisir de retrouver ces enquêtes et celle-ci me plait particulièrement vu qu’elle se déroule à l’Halloween. Elle n’est pas si exceptionnelle, mais je l’ai découverte très jeune et elle m’a toujours suivie au cours des années. Poirot enquête sur les rumeurs d’un petit patelin et sur le possible crime auquel aurait pu assister l’adolescente tuée. On suit son enquête avec plaisir!

Un bon livre de saison, avec un petit charme suranné qui me plait toujours autant.

La fête du potiron, Agatha Christie, éditions Librairie Des Champs-Elysées, Club Des Masques , 189 pages, 1973

La foire des ténèbres

Quelques jours avant Halloween, la foire est arrivée à Green Town en pleine nuit, dans un train mystérieux. Jim et Will ont entendu le chant de l’orgue et le sifflet du train, ils ont vu la foire débarquer. Seuls témoins d’événements inquiétants, ils savent qu’elle a de noirs desseins. Un carrousel qui, en tournant à rebours, inverse le cours du temps, la plus belle femme du monde endormie dans un bloc de glace, un homme qui a le pouvoir d’exaucer les vœux les plus fous… Telles sont les attractions de cette foire de cauchemar.

J’adore lire Bradbury à l’approche de l’Halloween. Plusieurs de ses romans proposent un univers qui fonctionne bien en cette période de l’année. J’étais donc très contente de retrouver sa plume cette année encore. La foire des ténèbres est un roman magnifique sur les peurs, l’adolescence et le fait de vieillir.  Ray Bradbury nous offre une atmosphère onirique et une plume poétique bien différente de ce qu’on peut lire généralement dans le même genre.

« Minuit donc! Les pendules de la ville trottinaient vers une heure, puis vers deux, trois et enfin l’aube. Chaque sonnerie des grands carillons secouait la poussière des vieux jouets entassés dans les greniers et faisait surgir des rêves d’horloges dans tous les lits où dormaient des enfants. »

À quelques jours de l’Halloween, une foire arrive à Green Town en pleine nuit. Jim et Will qui sont amis et voisins, entendent le bruit de l’orgue et du train et assistent à l’arrivée de la troupe. Une foire étrange, qui donne froid dans le dos. Quand le marchand de paratonnerre disparaît, puis l’institutrice, que les deux amis font la connaissance des personnages qui peuplent la foire, ils commencent à être effrayés. Cette foire propose de drôles d’attractions: un carrousel qui permet d’inverser le cours du temps, une femme magnifique endormie dans la glace, un homme électrique qui ressuscite, des manèges en réparation qui ne le sont pas vraiment, une sorcière qui survole la ville en ballon… Le décor est planté pour une Halloween mystérieuse et effrayante!

« Il faut se méfier des gens d’octobre. »

Avec l’aide du père de Will, Charles, gardien de la bibliothèque, les deux garçons vont tenter de comprendre ce qui se passe dans leur ville et essayer de survivre. J’ai adoré la relation entre Will et son père. C’est un homme rêveur et secret, qui a eu son fils tard. C’est un homme blessé qui vit mal le fait de vieillir. Ce rapport au temps, contrastant avec la jeunesse des adolescents et avec ce que propose la foire, est intéressant. Les forains tenteront d’en profiter, en croyant qu’il est une proie facile. Tout comme les deux garçons.

Le livre est construit en trois parties, de façon à suivre l’évolution et les déplacements de la foire des ténèbres: Arrivées, Poursuites, Départs. L’histoire évolue autour de ces grands axes, selon les péripéties que vivent Will et Jim, accompagnés de Charles qui deviendra un personnage important et attachant, malgré sa douce mélancolie.

« Will se dit que dans peu de temps la lumière s’allumerait à la fenêtre de la bibliothèque, à l’autre bout de la ville. Quand les rivières débordaient, quand le feu tombait du ciel, qu’il faisait bon se réfugier dans la bibliothèque, dans ses salles innombrables, au milieu de ses livres! Et, avec un peu de chance, personne ne vous y retrouverait. »

Gardien et concierge de la bibliothèque, il vit un peu dans son monde, jamais bien loin de toutes les légendes qui se matérialiseront devant lui. Le père et le fils ont des points en commun: pendant que le père profite de la bibliothèque la nuit, son fils s’évade par la fenêtre avec son ami.

« En regardant les deux garçons disparaître, Charles Halloway réprima une furieuse envie de courir avec eux, de tout abandonner. Il savait ce que le vent leur apportait, où il les emmenait… vers tous ces endroits secrets qui cessaient de l’être quand on avait grandi. »

Avec ce livre, Bradbury puise dans les peurs ancestrales et les vieux mythes pour créer une foire des ténèbres terrifiante. Au fil des pages, on a l’impression d’être dans un rêve, sombre, brumeux. Chaque fois, c’est particulier. On retrouve un peu le même genre d’univers que dans L’arbre d’Halloween ou Le pays d’octobre. Des livres parfaits en cette saison. Avec La foire des ténèbres, Bradbury pose un regard plein de poésie sur la vie et le passage du temps.

Lire un Bradbury est toujours un petit bonheur et ce livre n’a pas fait exception. Un auteur qu’on devrait lire et redécouvrir, assurément!

La foire des ténèbres, Ray Bradbury, éditions Folio, 416 pages, 2006

Au grand air t.8

La péninsule d’Izu. Ses côtes enchanteresses, ses paysages volcaniques, ses stations thermales, ses spécialités locales savoureuses… Autant de raisons pour nos amies d’aller visiter ce lieu de villégiature à la fois si proche et si loin de chez elles. Mais un voyage de cette ampleur se prépare en amont… Tout le groupe est de nouveau réuni pour un périple inoubliable !

J’avais déjà lu les tomes 1 à 7 au fil des ans quand j’ai réalisé qu’il existait de nouveaux tomes que je n’avais pas encore lus. J’aime reprendre cette série au fil du temps et replonger dans cet univers le temps d’un tome à l’occasion. 

Nous retrouvons ici le groupe de filles toujours adeptes du camping (principalement hivernal) qui décide de partir pour la péninsule d’Izu avec leur accompagnatrice. Rin quant à elle décide de faire le trajet en scooter, même si c’est très loin. Elle doit d’ailleurs peaufiner ses préparatifs pour être prête à toute éventualité car la route s’annonce longue. Le manga suit leur périple dans les différents lieux de villégiature.

Le manga se termine par quelques pages en bonus sur les activités extrascolaires des filles. On retrouve cette section d’un manga à l’autre, avec de courtes historiettes humoristiques.

J’aime beaucoup cette lecture qui porte très bien son titre. Les filles sont drôles et sympathiques. Ça se lit bien, on suit les préparatifs avant le voyage, puis le départ et les découvertes au fil de la route. C’est rafraîchissant!

Un manga sympathique que je vous conseille si vous aimez le grand air!

Au grand air t.8, Afro, éditions Nobi Nobi, 178 pages, 2020

Peur sur le lac

Ollie, Brian et Coco ont une nouvelle fois échappé de justesse à l’impensable sur le Mont Hemlock. Ils vivent désormais dans la peur de voir réapparaître un ennemi surnaturel. Or cette crainte fragilise leur amitié. Alors quand leurs parents proposent une virée en bateau sur le lac Champlain, ils restent sur leurs gardes… À juste titre ! Car un monstre surgi des abysses les envoie s’échouer sur la plage la plus proche : celle d’une île coupée du monde par un inquiétant et persistant brouillard…
Piégés, Ollie, Coco et Brian sauront-ils vaincre leur terreur et unir leurs forces pour survivre ?

J’aime beaucoup le travail de Katherine Arden. Je garde un grand plaisir de lecture de sa Trilogie d’une nuit d’hiver et j’aime beaucoup sa série jeunesse. Chaque tome se déroule dans des lieux et des saisons différentes. Ici il s’agit du troisième tome de sa série d’horreur pour les jeunes. Après l’Halloween et l’hiver, l’intrigue se déroule cette fois sur un bateau. 

On retrouve naturellement notre attachant trio habituel: Ollie, Brian et Coco. Après les événements vécus dans les derniers livres, les jeunes sont constamment sur le qui-vive et inquiets à tout moment de ce qui pourrait survenir dans leur vie. Ils savent bien que rien n’est vraiment terminé avec L’homme qui sourit…

Quand la mère de Coco propose à tout le monde une excursion sur le lac Champlain à la découverte du monstre légendaire, les jeunes sont enthousiastes. Enfin quelque chose pour leur changer les idées. Et il ne peut rien leur arriver sur un bateau, n’est-ce pas? Ils y retrouvent avec surprise Phil, neveu du capitaine, avec qui ils vont à l’école. Ils réalisent alors qu’il n’y a peut-être pas qu’eux qui ont gardé des souvenirs de ce qui s’est passé à Smoke Hollow (dans le 1er livre).

« Mais Brian avait visité suffisamment d’endroits étranges, de petits mondes hantés, pour savoir qu’il n’y avait jamais de miracle, jamais d’issue facile. »

Naufrages, île déserte, fantômes, monstres, ce roman réunit tous les ingrédients d’une bonne balade terrifiante en bateau. Comme dans les autres tomes, c’est efficace et c’est le genre de série que j’aurais adoré enfant. J’ai toujours autant de plaisir à découvrir les histoires de Katherine Arden.

J’ai passé un très bon moment avec ce livre et j’ai hâte à la dernière aventure qui devrait paraître à l’automne.

Peur sur le lac, Katherine Arden, éditions Pocket jeunesse, 216 pages, 2022