Là où règnent les baleines

Roanne adore les romans d’horreur, d’accord, mais ce n’était pas une raison pour l’envoyer passer l’été dans un phare en ruines, chez son oncle Kierzic qu’elle ne connaît même pas ! Cet homme aussi grincheux que mystérieux vit en solitaire sur un îlot planté au large de la côte Atlantique, avec pour toute compagnie une mouette rieuse et les rumeurs de l’océan. Dès son arrivée, Roanne est déterminée à s’en aller au plus vite de ce tas de cailloux désert. D’autant plus que, dans la bourgade du coin, on raconte que des naufrages auraient lieu les soirs de pleine lune. Au même moment, un bateau de pêche est porté disparu. Et d’où vient cette voix d’enfant qui l’appelle chaque nuit ? Plus le temps passe, plus Roanne se demande si Kierzic ne serait pas un…

J’ai beaucoup aimé cette lecture, dont la couverture est tout simplement magnifique! C’est d’ailleurs ce qui m’a attirée vers le livre, je dois l’avouer. Et puis j’aime les histoires de bateaux, de mer et de mystères.

Roanne est envoyée par sa mère pour l’été chez son oncle Kierzic qu’elle ne connaît pas. Son arrivée est catastrophique. Mais c’est encore pire quand elle réalise que son oncle vit seul dans un phare, sur une île désertée qui ressemble à un caillou géant. Ces vacances s’annoncent vraiment très pénibles décidément!

« …il prit le chemin de la bouquinerie locale. C’était là qu’il se fournissait, car il n’y avait pas de librairie au village, et emprunter un livre à la médiathèque l’aurait obligé à revenir toutes les trois semaines, ce qui était hors de question. Supporter la compagnie des humains une fois tous les trois mois pour faire les courses, c’était déjà trop. »

Quand Roanne commence à entendre une voix enfantine l’appeler, que des naufrages ont lieu dans la région et qu’elle surprend son oncle à sortir de l’eau en pleine nuit, elle commence à s’inquiéter… Surtout qu’il semble souffrir d’une étrange allergie. Son seul désir est alors de rentrer chez elle au plus vite.

Ce roman est vraiment bien écrit et agréable à lire. C’est un roman d’aventure qui met en scène un personnage d’adolescente bien intéressant. Roanne est un peu dramatique et on réalise bien vite qu’elle n’est pas si éloignée de son oncle avec sa façon têtue de se comporter. Elle fait de la nage synchronisée, adore l’eau et est passionnée de romans d’horreur. Elle lit Lovecraft et elle aime beaucoup Jurassic Park. Dans le phare il y a une grande bibliothèque où elle découvrira le carnet de son oncle. Carnet que l’on retrouve au centre du roman, en écriture manuscrite accompagné de croquis et de notes. C’est très joli et ça apporte un petit plus à l’histoire.

Ce qu’elle va ensuite découvrir est le grand secret qui a pesé sur les épaules de son oncle depuis son étrange disparition quand il était enfant. Je n’en dis pas plus pour ne pas gâcher l’intrigue, mais si vous aimez le monde marin et les histoires fantastiques peuplées de personnages étonnants, ce roman est pour vous. Le roman revisite d’une belle façon les légendes entourant la mer et ses naufrages, ainsi que les créatures imaginaires qui pourraient vivre sous l’eau.

J’ai passé un excellent moment avec cette lecture. On s’attache énormément à Roanne et Kierzic qui sont touchants dans leur façon imparfaite d’être ensemble. Un très beau roman jeunesse! 

Là où règnent les baleines, Jolan C. Bertrand, éditions L’école des loisirs, 295 pages, 2023

Peur sur le lac

Ollie, Brian et Coco ont une nouvelle fois échappé de justesse à l’impensable sur le Mont Hemlock. Ils vivent désormais dans la peur de voir réapparaître un ennemi surnaturel. Or cette crainte fragilise leur amitié. Alors quand leurs parents proposent une virée en bateau sur le lac Champlain, ils restent sur leurs gardes… À juste titre ! Car un monstre surgi des abysses les envoie s’échouer sur la plage la plus proche : celle d’une île coupée du monde par un inquiétant et persistant brouillard…
Piégés, Ollie, Coco et Brian sauront-ils vaincre leur terreur et unir leurs forces pour survivre ?

J’aime beaucoup le travail de Katherine Arden. Je garde un grand plaisir de lecture de sa Trilogie d’une nuit d’hiver et j’aime beaucoup sa série jeunesse. Chaque tome se déroule dans des lieux et des saisons différentes. Ici il s’agit du troisième tome de sa série d’horreur pour les jeunes. Après l’Halloween et l’hiver, l’intrigue se déroule cette fois sur un bateau. 

On retrouve naturellement notre attachant trio habituel: Ollie, Brian et Coco. Après les événements vécus dans les derniers livres, les jeunes sont constamment sur le qui-vive et inquiets à tout moment de ce qui pourrait survenir dans leur vie. Ils savent bien que rien n’est vraiment terminé avec L’homme qui sourit…

Quand la mère de Coco propose à tout le monde une excursion sur le lac Champlain à la découverte du monstre légendaire, les jeunes sont enthousiastes. Enfin quelque chose pour leur changer les idées. Et il ne peut rien leur arriver sur un bateau, n’est-ce pas? Ils y retrouvent avec surprise Phil, neveu du capitaine, avec qui ils vont à l’école. Ils réalisent alors qu’il n’y a peut-être pas qu’eux qui ont gardé des souvenirs de ce qui s’est passé à Smoke Hollow (dans le 1er livre).

« Mais Brian avait visité suffisamment d’endroits étranges, de petits mondes hantés, pour savoir qu’il n’y avait jamais de miracle, jamais d’issue facile. »

Naufrages, île déserte, fantômes, monstres, ce roman réunit tous les ingrédients d’une bonne balade terrifiante en bateau. Comme dans les autres tomes, c’est efficace et c’est le genre de série que j’aurais adoré enfant. J’ai toujours autant de plaisir à découvrir les histoires de Katherine Arden.

J’ai passé un très bon moment avec ce livre et j’ai hâte à la dernière aventure qui devrait paraître à l’automne.

Peur sur le lac, Katherine Arden, éditions Pocket jeunesse, 216 pages, 2022

La Dernière Frontière

À vingt et un an, l’auteur part pour une traversée solitaire de l’Alaska en canoë. Il suit le cours de la Tanana puis du Yukon jusqu’à la mer de Béring, à 2 000 kilomètres de son point de départ. Sur cet itinéraire peu cartographié, les bivouacs ne sont jamais sûrs, qu’ils soient en lisière de forêt, à la merci des ours, ou chez les habitants, adeptes de beuveries intenses sous le ciel flamboyant des jours polaires. Au-delà de ses représentations de la Dernière Frontière, de Jack London au National Geographic, l’auteur découvre au contact des Natifs leur culture et un territoire fascinant. Ce récit généreux, empreint d’humour, s’ouvre à l’autre en nous plongeant dans l’inconnu.

J’adore les récits de voyage en Alaska et j’ai beaucoup aimé ce livre. L’auteur nous raconte son voyage en solitaire, à bord d’un simple canoë.

Volodia a 21 ans quand il décide de partir pour suivre le cours de la Tanana puis du fleuve Yukon, jusqu’à la mer de Béring. Ce voyage dans la dernière frontière, lui fait découvrir le mode de vie de ceux qui y vivent, la chasse et la pêche, les lieux immensément fascinants, les difficultés de voyager en canoë et les problèmes en cours de route. L’auteur fait d’improbables rencontres, qui sont parfois étonnantes, parfois inquiétantes. Les lieux ne sont pas forcément comme ceux qu’on imagine dans les livres et les grands récits d’aventure. Parfois hostiles, souvent sympathiques et accueillants, certains natifs n’ont rien et sont prêts à tout offrir au voyageur. L’auteur se frotte aussi à un paysage plus grand que nature et à la menace des ours pour laquelle il tente de se préparer tout le long de son voyage.

« Chaque matin est une victoire sur la nuit. Si j’ouvre un œil, c’est qu’aucun prédateur ne m’a dévoré durant mon sommeil. »

Le voyage se fait essentiellement en solitaire, avec des rencontres de temps à autre lorsqu’il accoste quelque part. La routine est différente sur l’eau et la vie quotidienne semble bien loin. Les petits détails banals en pleine ville apparaissent ici comme des défis. Puis, la vie des hommes devient peu à peu inconfortable. La vie sauvage prend le dessus, parfois. Constats et questionnements parsèment ce récit. L’inattendu survient au bout d’une courbe ou dans le changement brusque de température.

J’ai beaucoup aimé la forme que prend ce récit de voyage, par petites touches, selon les événements et le déroulement de l’aventure. L’auteur affronte la solitude, les difficultés d’approvisionnement, la nature qui se déchaîne, l’humidité et l’eau qui imbibe tout. Il n’est pas toujours préparé face à ce qu’il doit affronter, mais se débrouille bien malgré les obstacles. Il se raconte avec sincérité et simplicité, parsemant son récit d’informations variées sur les lieux et l’histoire.

« Plus qu’un fait géographique, une rivière est une ligne de vie. De mort aussi. C’est en s’immergeant dans cette « Dernière Frontière »  naturelle qu’une frontière humaine se dévoile. »

La dernière frontière a été un grand bonheur de lecture. Un livre dans lequel on se laisse porter, aux côtés de l’auteur, dans une nature fabuleuse et au fil de l’eau. Un voyage passionnant où l’inattendu peut survenir à chaque instant!

Une carte du voyage et des principaux lieux visités par l’auteur est ajoutée au début du récit. Elle permet aussi d’identifier les rencontres ou les événements marquants.

La Dernière Frontière, Volodia Petropavlovsky, éditions Le mot et le reste, 168 pages, 2023

Widjigo

En 1793, Jean Verdier, un jeune lieutenant de la République, est envoyé avec son régiment sur les côtes de la Basse-Bretagne pour capturer un noble, Justinien de Salers, qui se cache dans une vieille forteresse en bord de mer. Alors que la troupe tente de rejoindre le donjon en ruines ceint par les eaux, un coup de feu retentit et une voix intime à Jean d’entrer. A l’intérieur, le vieux noble passe un marché avec le jeune officier : il acceptera de le suivre quand il lui aura conté son histoire. Celle d’un naufrage sur l’île de Terre-Neuve, quarante ans plus tôt. Celle d’une lutte pour la survie dans une nature hostile et froide, où la solitude et la faim peuvent engendrer des monstres… 

Widjigo est un roman prenant qui nous amène dans un monde de légendes. L’atmosphère est tout de suite intéressante dès les premières pages et j’ai aimé le contexte historique, assez rare il me semble en littérature de l’imaginaire. 

Nous sommes en 1793. Jean Verdier est un jeune lieutenant sommé de capturer un noble, Justinien de Salers, qui a trouvé refuge dans une vieille tour de pierres. Contre toute attente, le vieil homme accepte de le suivre à une seule condition: que Verdier écoute son histoire. D’abord méfiant, il accepte finalement. Autour d’une tasse de café, le noble lui parle de ce qu’il a vécu quarante ans plus tôt. Son histoire est celle d’un naufrage et de la survie en pleine nature, où l’horreur, la peur, la solitude, le froid et les monstres ne sont jamais loin…

« Ma mort traverse l’océan. Elle vient des glaces et des neiges. Il y a un Ankou, tu sais, là-bas… À Terre-Neuve. Ce sont les pêcheurs de Bretagne qui l’ont amené. Et d’autres créatures encore, qui étaient là bien avant nous. Qui naissent de la faim, et de la solitude… »

L’histoire racontée par Justinien de Salers se déroule en 1753, dix ans avant que la Nouvelle-France ne devienne une colonie britannique. Nous sommes aussi à l’aube de la déportation des Acadiens qui commencera deux ans plus tard, mais dont on perçoit déjà les prémisses dans ce roman. Le contexte historique est en filigrane, mais contribue beaucoup à l’ambiance du livre. J’ai adoré!

« En tous lieux les histoires se mêlent à ce que nous sommes, cette Terre même que nous arpentons, ces océans au travers desquels nous lançons nos courses. Les histoires nous relient à ceux qui nous ont précédés, également, tout au long des siècles. Ceux qui ont vécu bien avant notre ère, mais aussi ceux que nous avons croisés, ceux que nous avons aimés, ou haïs, et qui sont partis avant nous. »

Un mécène regroupe des personnages variés qui n’ont rien en commun. Ils sont mandatés pour une expédition à la recherche d’une autre expédition disparue, qui n’est jamais revenue. Ce roman, autant dans sa forme que dans le fond, est intrigant. On suit les personnages, qui se retrouvent malgré eux rescapés du naufrage de leur bateau, avec d’autres rescapés. C’est alors que le petit groupe tente de s’organiser et de survivre.

« Comment es-tu certain de n’être pas déjà mort? »

Les lieux sont isolés, la température est hostile. La nature est dangereuse. C’est alors que surviennent des événements troublants et on est rapidement happé par l’histoire. Le roman puise dans les légendes, les mythes autochtones et les histoires de marins, pour nous offrir une expédition étonnante et terrifiante.

Une histoire fantastique qui nous amène en Acadie, avec une atmosphère particulièrement inquiétante et efficace. J’ai beaucoup aimé l’époque du roman et la rencontre improbable des personnages. Si j’avais deviné une petite partie de l’intrigue, d’autre révélations se sont avérées plutôt surprenantes et je ne m’y attendais pas. Le livre est assez court, ce qui nous garde plutôt sur le qui-vive.

Une bonne lecture qui a su me surprendre!

Widjigo, Estelle Faye, éditions Albin Michel, 256 pages, 2021

Adlivun

1847, Angleterre. La Mary Céleste, navire du capitaine Briggs, est accosté au port de Douvres. Les autorités britanniques sont à la recherche d’hommes assez téméraires pour retrouver l’Erebus et le Terror, deux vaisseaux d’exploration disparus il y a un peu plus d’un an lors d’une expédition en Arctique. Motivés par une belle récompense, Briggs et son équipage décident d’entreprendre la mission de sauvetage. Mais une fois arrivés en terre inuite, ils tombent sur un navire fantôme, trop petit pour être l’Erebus ou le Terror. Leur périple prend alors une tournure inattendue…

Vincenzo Balzano crée des bandes dessinées atypiques que, personnellement, j’apprécie beaucoup. J’avais beaucoup aimé Clinton Road du même auteur et j’avais hâte de découvrir ce livre-ci, surtout qu’il aborde la disparition des bateaux de l’expédition de Franklin, un thème sur lequel j’adore lire.

Cette superbe bande dessinée se déroule en 1847. Nous sommes en Angleterre, alors que les autorités cherchent à recruter des volontaires pour partir sur les traces des bateaux de Franklin portés disparus: l’Erebus et le Terror. Briggs, un capitaine mystérieux qui cache bien des choses, décide d’entreprendre les recherches et part sur le Mary Celeste. En arrivant sur place, l’équipage fait des découvertes déroutantes…

« Fuyez loin d’ici! Pauvres fous! »

L’auteur a un style très particulier qui me plait beaucoup. Son dessin est étrange et onirique. L’atmosphère dans laquelle baigne l’histoire est toujours mystérieuse et inquiétante. Ce n’est pas une histoire linéaire et on peut s’amuser à en faire plusieurs interprétations. C’est surtout une lecture d’ambiance et si on est sensible à ce genre particulier, Vincenzo Balzano est assurément un auteur à découvrir. Clinton Road était aussi un peu dans le même genre, même si le sujet était totalement différent. Chez Balzano, tout se joue sur les impressions et l’ambiance mystérieuse qui plane dans l’air.

Les thèmes qu’il utilise dans ses bandes dessinées sont intrigants. Ici, il mélange la légende et les histoires terrifiantes en lien avec les naufrages. Franklin et le naufrage de ses bateaux ont marqué l’histoire. Il faut savoir que Briggs et le Mary Celeste ont aussi existé. Il est intéressant de lire sur ces deux événements puis de voir ce que Balzano en a fait dans Adlivun. Son interprétation de ces événements est intéressante.

J’aime définitivement beaucoup son travail puisqu’il nous plonger dans des lieux sombres et inquiétants, où le lecteur n’est jamais sûr de rien. Une belle découverte!

Adlivun, Vincenzo Balzano, éditions Ankama, 168 pages, 2022

La désolation

Evariste a quitté la Réunion pour fuir le conformisme de sa vie avec Amandine. Il embarque sur le « Marion Dufresne » pour accompagner une mission scientifique dans les Terres australes et antarctiques françaises. La traversée, l’arrivée à Port-aux-français, tout avait bien commencé ; jusqu’à une expédition où le groupe est violemment attaqué. Perdu au milieu de l’immensité d’un paysage glacé de cette île de la désolation, prisonnier d’une troupe de personnages hagards et brutaux, il va vivre son expérience physique et intérieure la plus extrême…  

J’ai eu un gros coup de cœur pour cette bande dessinée à la fois étonnante et vraiment très prenante.

On suit le personnage d’Évariste qui fuit une douloureuse rupture amoureuse. Il vend sa voiture et sans rien dire à personne, quitte La Réunion pour s’engager sur un navire scientifique en direction de Kerguelen. Un endroit surnommé l’Île de la Désolation.

« Me voilà sur le Marion-Dufresne, pendant plus d’un mois, en route pour les Terres australes et antarctiques françaises. Inconnu, presque en clandestin. Pendant un mois, je disparais de La Réunion. Personne ne saura où je suis, personne. Regardez-moi, je suis l’homme qui disparaît de la vie, sans que vous le sachiez. »

C’est un périple de plus de 8000 kilomètres où il côtoie des scientifiques et des naturalistes passionnés. Ce bateau et ces terres sont des lieux où géologues, météorologues, astrophysiciens, biologistes, vulcanologues, océanographe, hydrographes, botanistes et bien d’autres vivent, étudient et tentent de comprendre l’évolution du climat. Le nord étant un bon baromètre de ce qu’il adviendra du reste de la planète.

La nature et le réchauffement de la planète sont des thèmes centraux de cette histoire. Les auteurs y abordent plusieurs thèmes en lien avec l’écologie, l’introduction d’animaux en des lieux inappropriés, des catastrophes sur la végétations et les populations indigènes. À travers cette histoire, on parle aussi de la façon dont l’humain traite la nature, se l’approprie et détruit par le même fait la biodiversité.

« C’est dans le dernier territoire véritablement sauvage, isolé de tout (et de tous, surtout) qu’on se rend compte que la planète est foutue. Et nous, touristes de l’extrême, nous avons acheté ce petit voyage vers le dernier sanctuaire. Nous avons bousillé la planète mais nous avons le droit de voir une dernière fois ce que nous avons foutu en l’air. »

Au fil des pages, on voit ce à quoi pense Évariste, ses réflexions autour de sa vie et de sa rupture. L’arrivée à Port-aux-français est difficile pour lui: c’est un climat qu’il n’apprécie pas, dans des territoires complètement sauvages. Il fuit sa vie et son mal être vers une destination qui lui est inconnue. Jusque là, l’histoire est assez tranquille. On vit le quotidien sur le bateau et les échanges avec les scientifiques.

Invité à joindre un scientifique lors de sa sortie sur le terrain, Évariste a l’impression d’être seul au monde. Mais il est loin de l’être… La bande dessinée prend alors une tournure inquiétante et totalement inattendue. L’histoire frôle l’horreur avec une fin à laquelle on n’était absolument pas préparé.

Un livre qui m’a surpris, auquel je ne m’attendais pas du tout, à cause de cette tournure surprenante. J’ai un grand intérêt pour la nature, la faune et la flore. Le côté fictif, suspense et horreur qui est amené au fil des pages a retenu mon attention. C’est très prenant. On veut absolument savoir ce qui va se passer. On ne peut pas deviner la fin de cette bd. C’est donc une lecture qui débute doucement et devient palpitante.

Pendant la lecture le lecteur se retrouve à vivre à travers le personnage principal les émotions et ce que Évariste vit. Tout d’abord sa fuite, pour oublier sa peine et son désespoir, puis la possibilité de découvrir autre chose et de vivre quelque chose de différent. C’est certain qu’il s’agit d’une aventure à laquelle ni les personnages, ni le lecteur pouvaient s’attendre.

J’ai beaucoup aimé le dessin, qui représente bien l’atmosphère des lieux, entre l’expédition, la découverte de territoires hostiles et la tournure un peu sombre que prend l’histoire. Je ne connaissais pas du tout le dessinateur et j’ai vraiment aimé le coup de crayon un peu gras et les couleurs franches. C’est vraiment à mon goût, surtout pour une histoire comme celle-là. On s’attend à une expédition tout ce qu’il y a de plus classique alors que les auteurs cachent bien leur jeu et c’est ce qui est surprenant avec cette bd. On ne s’attend pas à aller là où les auteurs nous amènent.

La fin est marquante et difficile à oublier. Ça fait réfléchir sur les peuples indigènes et le rôle de l’homme dans la nature. L’aventure se mêle à la tragédie et à l’horreur, avec une réflexion écologique. Une histoire qui reste en tête, assurément. Un coup de cœur. À découvrir!

Ce livre est finaliste du Prix des libraires 2022 dans la catégorie bd hors Québec.

La Désolation, Appollo, Christophe Gaultier, éditions Dargaud, 96 Pages, 2021