Un outrage mortel

Quittant sa retraite de Three Pines, Armand Gamache accepte de reprendre du service à titre de commandant de l’école de police de la Sûreté. À cette occasion, Olivier lui offre une curiosité : une carte centenaire qui était emmurée dans la salle à manger du bistro du village. Il n’en faut pas plus pour mettre l’ancien enquêteur sur la piste d’un passé qu’il préférerait sans doute oublier. C’est alors qu’entrent en scène quatre étudiants de l’école de police et un professeur… découvert assassiné. Dans la table de nuit de la victime, une copie de la carte de Gamache fait peser de lourds soupçons sur ce dernier. D’autant que son comportement avec une recrue au profil inquiétant désarçonne tout le monde, y compris le fidèle Beauvoir. Le commandant a ses secrets, mais les outrages du passé ne sont-ils pas plus dangereux lorsqu’on veut les occulter ?

Un outrage mortel est la 12e enquête d’Armand Gamache. C’est un roman que j’ai particulièrement apprécié. Je l’ai lu en lecture commune avec ma collègue. 

Armand et Reine-Marie vivent maintenant à Three Pines. Elle s’occupe maintenant de la société d’histoire de la région et lui a accepté de reprendre la direction de l’école de police, toujours dans le but de purger l’organisation de sa corruption. Gamache s’entoure de gens étonnants qui ne sont pas ses amis. Il interfère dans le processus de sélection des étudiants pour accepter certains d’entre eux qui avaient été recalés. D’ailleurs, j’ai trouvé l’histoire d’Amelia particulièrement intéressante. Sa présence détonne dans l’univers de l’école de police et on se demande bien pourquoi elle est là.

Quand un professeur est tué à l’école, quatre étudiants ressortent du lot. Tout le monde est soupçonné du crime, même Gamache. Un peu avant, on découvre une carte étrange qui était anciennement cachée dans les murs du bistro de Three Pines. Gamache l’a fait encadrer et elle orne son appartement à l’école. Toutefois, cette carte refait surface lors du meurtre du professeur. Pourrait-elle être liée au crime? Pour sauver leur peau, Gamache, Reine-Marie, les villageois de Three Pines, Beauvoir, Lacoste et les quatre étudiants devront enquêter pour découvrir d’où provient la carte et qui a tué le professeur.

« Ne crois pas tout ce que tu penses. »

J’ai adoré ce roman qui mêle enquête criminelle, histoire et géographie. On retrouve Gamache entre l’école de police et Three Pines ce qui est bien agréable. Le fait de changer de lieu apporte un plus à l’histoire. Malgré cela, on ne s’éloigne pas trop de Three Pines puisque le petit village devient vite le quartier général des dessous de l’enquête.

« Ruth était partisane du précyclage. Une forme plus évoluée de recyclage. Elle prenait des objets avant que leurs propriétaires s’en débarrassent. »

L’humour, les bons petits plats gourmands et les villageois (Ruth est en grande forme dans celui-ci !) sont bien présents, ainsi qu’une nouvelle dynamique que l’on découvre: les dessous d’une école de police corrompue. J’ai adoré aussi toute l’histoire autour de la carte étrange découverte dans les murs du bistro et la recherche dans les archives. C’est passionnant! Les histoires de cartes sont fascinantes et titillent l’imagination. C’est réussi ici! On apprend aussi des petites choses sur le village fictif de Three Pines.

« C’est la géographie qui fait de vous un conquérant ou un conquis. »

La conclusion de cette enquête est belle et touchante. C’était vraiment un très très bon Gamache que celui-ci! Si vous aimez l’histoire, la géographie, la cartographie et les archives, je vous le conseille assurément.

Un outrage mortel, Louise Penny, éditions Flammarion Québec, 496 pages, 2017

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Une saison pour les ombres

1972, nord-est du Canada. Dans cette région glaciale, balayée par les vents, où l’hiver dure huit mois, la petite communauté de Jasperville survit grâce au travail dans les mines de fer. Les conditions de vie y sont difficiles. Au-delà du village, il n’y a rien. Juste une nature hostile, quelques ours, des loups. Aussi, quand le corps d’une adolescente du village est découvert aux abords de la forêt, la gravité des blessures laisse-t-elle supposer qu’elle a été victime d’une bête sauvage. Ce sera en tout cas la version officielle. Et tout le monde prie pour qu’elle soit vraie. Mais, quelque temps après, le corps d’une autre jeune fille est retrouvé. Des années plus tard, de retour à Jasperville où il a passé son enfance, Jack Devereaux réalise que tout le monde se contente aujourd’hui encore des mensonges du passé, par peur d’affronter une vérité bien trop dérangeante.

En commençant ce roman, je ne m’attendais pas du tout à ce que j’ai lu. Je croyais lire un thriller classique, une enquête policière, mais c’est beaucoup plus que cela.  

Le roman se déroule dans une petite communauté fictive, Jasperville, inspirée de villes minières comme Schefferville. J’ai été agréablement surprise de voir que le roman se déroulait au Québec. Ça m’a fait tellement plaisir! Ça me semble assez rare en littérature étrangère pour être souligné.

Jacques Devereaux (qui a changé son nom pour Jack quand il a fuit sa vie à Jasperville) reçoit un appel de la police. Son frère Calvis, qu’il n’a plus revu depuis 26 ans, a attaqué un homme qui est entre la vie et la mort. Calvis est en détention. La ville a peu de moyens et le seul policier de la région ne sait pas quoi faire de cet homme. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il a retrouvé Jack. De leur famille, il ne reste que lui pour prendre soin de Calvis. Il retourne donc dans cette petite communauté où il a grandit et qu’il a fuit, malgré ses promesses de prendre soin de ceux qu’il avait promis de soutenir. Il était jeune et avait peur. La fuite était devenue une question de survie.

« Jasperville n’était ni plus ni moins qu’un cimetière, doué d’une inexplicable capacité à ôter la vie tout autant que la santé mentale de ses habitants. »

Avec lui, nous plongeons dans le passé et dans ses souvenirs. On retourne dans les années 70 où l’on avait alors retrouvé le corps d’une jeune fille. Cette découverte avait ébranlé les citoyens. Quand une seconde jeune fille est retrouvée sans vie, la communauté isolée et laissée à elle-même a du mal à se relever. Les événements qui s’y déroulent vont en rendre fou certains, alors que d’autres, comme Jack, vont tout faire pour mettre tout ça derrière eux. Même jusqu’à devenir eux-mêmes des ombres… et à oublier de vivre.

« On est soi-même, mais on porte en soi les fantômes de tous ceux qu’on aurait pu devenir. »

J’ai beaucoup aimé cette lecture que j’ai trouvé très prenante. Ce n’est pas un thriller au sens où on l’entend. C’est un roman psychologique, finement construit, qui décortique la vie d’une famille et d’une petite ville isolée. L’histoire alterne entre le passé et le présent, ce qui va nous permettre, au fil des pages, d’essayer de saisir l’ampleur des événements. C’est en retenant son souffle que l’on tourne les pages pour essayer de comprendre ce qui a pu se passer à l’époque… et ce qui se déroule encore aujourd’hui. On imagine sans mal les lieux, le froid, la solitude et le manque flagrant de ressources. Il est difficile de mener de front une enquête quand l’aide et les employés se font rare, que chacun ne souhaite que retourner à sa propre vie en essayant d’oublier la douleur et que la rotation des effectifs rend complexe la recherche de la vérité. 

Une saison pour les ombres est un excellent roman rempli de secrets, de mensonges et de l’histoire de familles complètement démunies devant les événements. Une histoire de souffrances et de ténèbres, dans un décor hostile et glaçant. J’ai beaucoup aimé cette lecture!

Une saison pour les ombres, R. J. Ellory, éditions Sonatine, 408 pages, 2023

American Predator

Anchorage, Alaska. Une nuit glaciale de février 2012, la jeune Samantha Koenig disparaît. Une caméra de surveillance raconte bientôt la suite de l’histoire : on y voit un inconnu armé enlever l’adolescente. La police lance une chasse à l’homme jusqu’à l’arrestation d’un suspect bien sous tous rapports. Honnête travailleur et père de famille, comment peut-il vraiment être impliqué dans cette affaire ?  Véritable enquête aux confins de la folie, American Predator raconte le parcours d’un psychopathe glaçant qui a sévi durant des années sur l’ensemble du territoire américain, sans jamais être inquiété.

Voilà un livre totalement perturbant. Ce qu’on y retrouve est terrifiant, mais on ne peut s’empêcher de continuer à lire pour tenter de trouver une explication à tout ce qu’on y lit. Pour tenter de comprendre, si cela est possible, ne serait-ce qu’un peu. Comment tout cela a pu se produire?

Alaska, février 2012. Une jeune femme, Samantha Koening, disparaît. Une caméra filme l’enlèvement, mais les indices sont minces. Avec le travail méticuleux de certains experts, des pistes commencent à apparaître. Cette disparition mènera à une chasse à l’homme à travers les États-Unis. Et celui qu’on arrête, père de famille sans casier judiciaire, défie l’entendement. Et pourtant…

Cette histoire, basée sur les documents et entretiens des agents du FBI qui ont travaillé sur cette affaire, brosse le portrait d’un tueur en série organisé, méthodique, discipliné et insoupçonnable. C’est un ouvrage vraiment terrifiant à cause de la façon de fonctionner du tueur: il a pu perpétrer ses crimes pendant des années sans représailles. Parfois amusé, souvent distant, mais ayant pris goût aux feux de la rampe – et c’est ce qui le mènera à son arrestation – ce psychopathe donne froid dans le dos.

« L’homme dont il est question dans ce livre a chamboulé les convictions des agents du FBI eux-mêmes. C’était un monstre d’un nouveau genre. Un monstre qu’on soupçonne d’être responsable de la plus grande série de disparitions et de meurtres non élucidés de l’histoire américaine contemporaine. Pourtant, vous n’avez sûrement jamais entendu parler de lui. »

Dès le début, on ne soupçonne pas ce que l’on va lire, même si la carte reproduite dans les premières pages montre toutes les villes visitées par le tueur. Cette carte est dérangeante, peut-être parce qu’elle expose visuellement tout ce qui suivra. Ce compte rendu, qui se lit comme un roman mais n’en est pas un, nous fait entrer dans la tête du tueur. Ses actes abominables. Ses gestes incompréhensifs. Les répercussions de ses crimes sur les gens des communautés où il est passé. Sur les policiers, les enquêteurs qui ont travaillé sur cette affaire. On sait que ce que l’on va lire ne nous laissera pas indemne… 

Dès l’arrestation, on commence à percevoir ce qui se cache sous la surface. Le tueur joue avec les enquêteurs. Et plus on tourne les pages, plus on découvre de nouvelles choses et plus tout cela nous apparaît insensé. Ce qui est troublant, c’est que l’histoire se déroule à notre époque, à l’ère des réseaux sociaux, des caméras de surveillance, des données électroniques. Pendant si longtemps, ce criminel a pu perpétrer ses crimes sans que quiconque puisse le soupçonner. Comme le dit si bien l’auteure: un tueur analogique dans un monde numérique.

Le travail de Maureen Callahan est minutieux, impressionnant et passionnant. Elle épluches les archives, les relevés d’enquêtes, les dépositions. Elle rencontre des gens qui ont travaillé sur cette affaires ou qui ont eu des liens avec des gens impliqués. Certaines personnes sont touchantes et m’ont émue. Je pense au plongeur dont le travail et la vie personnelle sont étroitement liés. J’ai apprécié également tout le processus d’enquête qui est raconté, le travail de recherche, les ressources utilisées et la coordination de plusieurs corps policiers. Même si on plonge littéralement dans l’horreur et dans des crimes sordides, le livre est vraiment prenant. Maureen Callahan a fait un travail de recherche monumental avec cet ouvrage. La somme d’informations récoltée est incroyable. En même temps, l’ouvrage est tellement fluide et bien raconté qu’il se lit aisément.

L’histoire, véridique, m’a particulièrement troublée. C’est fort, c’est terrifiant, c’est horrible, c’est tordu, mais c’est aussi fascinant. J’ai lu ce livre pratiquement d’une traite, sans être capable de le poser. Et j’ai envie d’en lire d’autres. Ça tombe bien, l’éditeur propose une nouvelle collection d’histoires criminelles, par états américain. Je crois bien que je vais me laisser tenter!

American Predator, Maureen Callahan, éditions 10/18, 384 pages, 2022

Meurtres avec malveillance

La vie n’est pas de tout repos pour Thumps DreadfulWater. Alors qu’il peine à accepter tant son diabète que le cancer de Claire, voilà que la productrice d’une populaire émission d’affaires criminelles, Nina Maslow, débarque à Chinook et insiste pour que Thumps l’aide à réactiver un vieux dossier. De fait, il y a bien des années, Trudy Samuels, une jeune fille de bonne famille, avait été trouvée morte au pied d’une falaise. À l’époque, les penchants de Trudy pour l’alcool et la drogue étant bien connus, toute la population de Chinook, shérif en tête, avait adhéré à la thèse de l’accident… sauf la mère de Trudy, qui a tout de suite accusé le petit ami de sa fille, « un vaurien d’Autochtone ! », de l’avoir tuée. Or, si la productrice tient tant à déterrer ce triste épisode, c’est qu’elle y a flairé tous les ingrédients gagnants de son émission : sexe, racisme et célébrité entachée, car ledit « vaurien », Tobias Rattler, est aujourd’hui un écrivain de grande renommée. Thumps, qui ne comprend pourquoi la productrice tient tant à son aide – il ne résidait même pas à Chinook au moment des faits –, sent toutefois sa fibre policière s’éveiller quand on découvre Nina Maslow – morte ! – au même endroit et dans les mêmes circonstances que la jeune Trudy…

J’adore la série des enquêtes de Thumps DreadfulWater, cet ancien policier Cherokee, devenu photographe. Meurtres avec malveillance est le quatrième de la série, mais les tomes peuvent aussi se lire séparément. Toutefois, c’est toujours intéressant de suivre l’évolution du personnage d’un livre à l’autre. Celui-ci se déroule à l’automne, toujours dans la petite ville de Chinook. Cette fois, la Chambre de commerce a un nouveau programme appelé « Howdy », soit l’accueil des clients et des touristes à la sauce western. C’est totalement loufoque et ça allège un peu les déboires que vit Thumps.

Les choses ne vont pas très bien pour lui: son amoureuse Claire, toujours très indépendante, se bat contre un cancer. Lui-même a été diagnostiqué comme diabétique et il vit dans le déni. Il a aussi prêté sa voiture qui a été emboutie. Elle ne sera sans doute pas réparable et il doit chercher un autre moyen de transport. Finalement, sa chatte Freeway est introuvable.  Même si leur relation est particulière, la bête manque à Thumps. C’est alors que la production d’une émission d’affaires criminelles débarque à Chinook et qu’elle veut à tout prix rouvrir un vieux dossier. Le shérif et la production font appel à Thumps qui, comme toujours, ne demande qu’à avoir la paix. Mais quand plane en filigrane les « meurtres d’obsidienne », l’affaire qui hante Thumps et qui l’a poussé à abandonner le métier, il commence à s’y intéresser un peu plus. Lorsqu’un nouveau cadavre est découvert, en lien avec l’émission de télévision, Thumps n’a d’autre choix que d’accepter de se joindre à l’équipe. Il faut dire qu’on lui force un peu la main. 

« Thumps s’était toujours représenté les crimes comme des casse-tête qu’on achète dans une boutique d’occasion: rien ne garantit que tous les morceaux se trouvent dans la boîte. »

Je crois que de toutes les histoires jusqu’à maintenant, celle-ci est ma préférée des enquêtes de DreadfulWater. L’intrigue est intéressante et comme toujours les dialogues sont savoureux. On retrouve d’anciens personnages comme Al et Archie qui me font toujours rire, mais aussi le mécanicien russe Stas que je trouve hilarant, ainsi que le Shérif et son café légendaire. Il y a toujours le casse-croûte qui ne paie pas de mine où Thumps adore déjeuner (ce qui est problématique maintenant qu’il est diabétique et se questionne sur sa nourriture) et la morgue de Beth qui lui donne la frousse. Les dialogues sont excellents et plein d’humour, on passe un très bon moment! Il me semble qu’il y a un peu plus d’humour dans ce tome et je trouve que ça fonctionne très bien!

« Acte un. Le shérif le tire de force de chez lui.
Acte deux. Le shérif tente de l’empoisonner avec un wrap à la graisse de bacon.
Acte trois. Le shérif l’oblige à trimballer un cadavre jusqu’au sommet d’une montagne.
Acte quatre. Le shérif le contraint à cuisiner l’homme qui a découvert le cadavre.
Bref, il était devenu le Vendredi de Robinson Crusoé. Il lui fallait un meilleur agent. »

Comme dans tous les tomes, il y est question de l’affaire des « meurtres d’obsidienne » qui hante Thumps depuis le tout début de la série. Cette affaire a changé sa vie, lui a même fait arrêter sa carrière et déménager. Elle apparaît toujours en filigrane de toutes les autres enquêtes, mais ici, elle sert en quelque sorte de monnaie d’échange. On sent que bientôt, certaines choses sur cette affaire seront approfondies. La fin du roman et le titre en anglais du prochain tome qui devrait être traduit pour l’automne prochain, nous donnent à penser que les « meurtres d’obsidienne » connaîtront un certain dénouement ou du moins, nous fourniront plus d’informations. Je l’avoue, en terminant ce livre, j’ai déjà hâte de retrouver Thumps. Ce personnage pourtant imparfait, est très attachant!

Une série que je vous conseille, qui parle des autochtones, des réserves, qui offre de bonnes enquêtes et qui est pleine d’humour. Thomas King a décidément un don pour créer des personnages incarnés, présents et profonds, tout en créant des dialogues drôles et amusants même si les sujets traités ne le sont pas toujours.

Une excellente lecture!

Meurtres avec malveillance, Thomas King, éditions Alire, 373 pages, 2022

Billy Summers

Billy Summers est un tueur à gages, le meilleur de sa profession, mais il n’accepte de liquider que les salauds. Aujourd’hui, Billy veut décrocher. Avant cela, seul dans sa chambre, il se prépare pour sa dernière mission…

Billy Summers est le petit dernier de Stephen King et c’est un très bon roman! Pas d’horreur ici, on plonge plutôt dans un excellent roman policier, thriller et récit de guerre. C’est bien mené, touchant et pas du tout prévisible. L’histoire a aussi un petit côté fascinant tant on en apprend plus sur le métier bien particulier du personnage central de l’histoire.

Billy est un tueur professionnel. Il joue un peu à l’idiot et prend des contrats pour de l’argent. Il vit de cela. Mais Billy est un tueur avec une conscience: il ne tue que les méchants. S’ils ne le sont pas suffisamment, il refuse le travail. Le jour où il s’apprête à prendre sa retraite, il accepte un dernier contrat. Un tout dernier, pour boucler la boucler. Et parce que le montant d’argent tout au bout est conséquent. Suffisamment pour prendre une retraite dorée. Surtout que Billy n’est pas si vieux. Cependant, certaines choses lui semblent étranges et il se méfie. L’organisation paraît impeccable mais Billy n’a pas tout à fait confiance. Alors il se prépare un plan B au cas où… C’est aussi sous couverture pour cette affaire, celle d’un « écrivain » en plein travail d’écriture, qu’il découvre le plaisir d’écrire pour vrai. Il se prend au jeu, lui qui est déjà un grand lecteur. Vous l’aurez deviné, Billy Summers ne ressemble pas vraiment à l’idée qu’on peut se faire d’un tueur à gages.

Dans ce roman, on s’attache beaucoup à Billy. Même si son travail pose forcément des questions morales pour le lecteur, on lui souhaite le meilleur du monde. C’est un bon gars. Même s’il tue. J’aime beaucoup quand les auteurs jouent avec nous en nous présentant des personnages de ce genre. Des personnages pour qui on se prend d’affection, mais qu’on devrait en fait détester parce que ce qu’ils font n’est pas bien. Du moins en apparence.

« Peut-être qu’une histoire glaçante doit être écrite dans un endroit glacial. »

Billy est un ancien tireur d’élite de l’armée. Dans son rôle d’écrivain, il décide de nous raconter son histoire personnelle. Pour entrer dans son personnage et offrir une couverture réaliste, on lui suggère d’écrire pour vrai. Ce qu’il prend plaisir à faire. C’est l’occasion de découvrir alors un roman, dans le roman, celui de la vie de Billy, de son enfance traumatisante aux missions de guerre, en passant par son travail comme tueur, son amitié avec Bucky et sa rencontre totalement inattendue avec Alice.

J’ai aimé la forme de ce roman, assez particulière, ainsi que la description de toute la préparation entourant les « contrats » de Billy. Surtout que son dernier travail exige beaucoup de préparation et une longue couverture dans un quartier résidentiel. C’est avec étonnement et fascination qu’on découvre la façon dont il met en place toute la trame d’une couverture et qu’il se prépare à l’acte final: tuer un homme dont la tête a été mise à prix.

L’histoire de Billy Summers est passionnante et humaine à la fois. Les derniers chapitres m’ont beaucoup touchée d’ailleurs. C’est un ouvrage qui nous rejoint et qui démontre encore une fois tout le talent de Stephen King, qui peut passer avec fluidité d’un genre littéraire à l’autre. Il sait créer des personnages qui ont de la substance et qui viennent nous chercher. 

« Peut-être que votre dernier boulot ne devrait pas être seulement le plus lucratif, peut-être qu’il devrait être aussi le plus intéressant. »

Billy Summers est assurément un personnage qu’on n’oublie pas. La teneur psychologique de ce roman est importante et apporte beaucoup de profondeur au texte. J’ai adoré ce nouveau roman du King. C’était une super lecture que je vous conseille assurément! 

Billy Summers, Stephen King, éditions Albin Michel, 560 pages, 2022