Déjeuner avec papa – Recueil de napperons

« Tous les dimanches matins, à 10 h 30, Papa et moi on va déjeuner-dîner au restaurant. C’est notre rituel.» Depuis que les parents de Gaspard sont séparés, rien n’est plus comme avant. Heureusement, il reste des rituels rassurants comme les assiettes deux œufs bacon, patates dorées, pain brun avec du beurre de pinottes du dimanche. Roman graphique original et empreint de mélancolie, Déjeuner avec papa met en mots et en images de petits et grands bouleversements.

Ce roman graphique est un grand plaisir de lecture. J’ai aimé l’originalité du livre, sous-titré « Recueil de napperons ». C’est l’histoire d’un jeune garçon qui va déjeuner au restaurant avec son père tous les dimanches. C’est un moment attendu, une routine importante pour lui. On aime toujours aller au restaurant pour déjeuner, petit bonheur qu’on partage avec le jeune garçon. L’histoire est axée sur la relation père-fils, un moment spécial pour eux qui leur permet d’échanger, de se rapprocher et de solidifier leur relation. Même si le papa de l’histoire est un homme réservé qui parle peu, ces déjeuners parent/enfant vont aussi permettre au garçon de mieux appréhender ce que son père traverse comme  événements difficiles.

« Mon père ne me dit jamais qu’il m’aime. Je l’ai déjà dit: c’est un homme de peu de mots. Un homme de silence, même. Mais il étale l’amour qu’il me porte partout sur ses murs. »

À travers ce recueil de napperons, on découvre ce que le père et le fils vivent au quotidien et les bouleversements auxquels ils font face. Le livre aborde d’une façon intelligente de nombreux sujets: le deuil et la mort d’un être cher, la séparation des parents, la vie de couple, l’homoparentalité, les rôles parentaux et leur répercussion sur l’enfant lors de grands changements. Un livre qui peut aussi très bien se prêter à une lecture avec son enfant et offrir une base à de nombreuses discussions. Le livre s’y prête bien puisqu’il est illustré et reprend l’ambiance d’un déjeuner au restaurant.

Même si le livre aborde une foule de sujet, j’ai aimé que les auteurs mettent en valeur une richesse qui se perd de plus en plus: le plaisir de manger ensemble, en famille. Ce livre met aussi ce partage en relief. C’est un livre agréable à lire même pour adulte. Vraiment, un ouvrage universel qui permet de voir différentes dynamiques familiales alors que le père et le fils partagent un moment important, que personne ne peut leur enlever.

C’est mon premier livre de Simon Boulerice et j’ai adoré. J’ai été agréablement surpris par la qualité du travail de l’auteur et de l’illustratrice Anne-Julie Dudemaine. Toutes les pages sont illustrées. Le style de dessin se marie énormément bien avec l’écriture manuscrite. Il y a aussi des cernes de café sur différentes pages, comme un vrai « recueil de napperons ». J’ai adoré!  Visuellement, c’est un très bel ouvrage.

Un auteur que j’aimerais assurément relire.

Déjeuner avec papa – Recueil de napperons, Simon Boulerice, Anne-Julie Dudemaine, éditions de la Bagnole, 76 pages, 2022

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Chimie 501

Max ne veut qu’une seule chose pour sa dernière année de secondaire : passer inaperçu et ne pas faire de vagues. Mais l’arrivée d’un nouvel élève aussi beau que sympathique et dont la seule présence lui donne des papillons vient tout chambouler… Si Nic a accepté de suivre sa mère à Montréal et d’y finir son secondaire 5, c’est dans le seul but d’oublier Jennifer et sa peine d’amour. Il n’avait aucune intention de tomber dans un tourbillon de sentiments confus… pour un gars. Mais on ne peut rien faire contre la chimie qui peut parfois provoquer des réactions explosives !

J’ai lu Chimie 501 de Josée De Angelis en lecture commune avec une amie sur Instagram. Nos avis se ressemblent quand même beaucoup. On a eu un ressenti plutôt semblable. Ce roman se lit facilement et avec plaisir. J’ai beaucoup aimé cette lecture!

L’histoire raconte la rencontre entre Max, qui n’est pas toujours à l’aise à l’école, et de Nic, un nouveau venu qui arrive d’Ottawa et qui a besoin de s’éloigner un peu. Entre les deux le courant passe presque tout de suite. Ils sont bien ensemble et découvrent qu’ils s’apprécient bien plus que comme de simples amis… Mais cette situation est compliquée. Max a subi de l’intimidation et il s’est souvent fait niaiser par les autres. Il est beaucoup plus sensible à tout ce qu’il ressent. De son côté, Nic a le sentiment de vivre une double vie. Quand il est à Ottawa il est celui qu’il croyait être alors qu’à Montréal il devient le gars avec un amoureux secret. J’ai aimé cette dualité dans le roman qui amène un point de vue intéressant sur une histoire qui aurait pu être assez classique.

Le roman raconte le quotidien de deux adolescents qui vivent des choses auxquelles ils ne s’attendaient pas forcément. C’est l’histoire des débuts de leur relation et la découverte de l’intimité dans une situation qui n’est pas simple ni pour l’un, ni pour l’autre. Les chapitres du roman sont conçus pour qu’on alterne entre les points de vue de Max et ceux de Nic, au fil des chapitres.

« … son absence fait un gros trou. Je sais plus ce que je faisais de mon temps avant, je me souviens pas de comment je passais les heures dans une fin de semaine. »

J’ai bien apprécié cette histoire pour jeunes adultes où les partys sont mémorables (en tout cas, les miens ne ressemblaient vraiment pas à ça), et où l’on suit Max et Nic, deux ados attachants. Les pages défilent forcément assez vite et l’histoire se lit aisément. La seule chose qui m’a manqué: un prologue! Je voulais en savoir plus sur le « après juin ». Je trouve que ça manque un peu. Dans l’ensemble c’était une bonne lecture. Pas marquante mais agréable à lire pour passer un bon moment. 

Ce que j’aime particulièrement dans les romans des éditions Parc en Face, une filiale pour jeunes adultes des éditions Les malins, c’est qu’on retrouve toujours une liste musicale de titres en lien avec les personnages et l’inspiration de l’auteur(e). C’est quelque chose que j’adore dans les livres et ici, chaque roman en a une. C’est vraiment, un gros plus de pouvoir se plonger dans l’atmosphère musicale d’un roman. J’adore ça!

Fait amusant, l’auteure a écrit un autre livre où l’on retrouve un personnage de Chimie 501, Jeanne. Le roman s’appelle Fille facile et aborde un thème que l’on retrouve assez rarement dans la littérature il me semble.

Chimie 501 a été une bonne lecture. Si vous aimez Heartstopper mais que vous voulez une histoire moins gentillette, ce livre est pour vous!

Chimie 501, Josée De Angelis, Éditions du Parc en face, 384 pages, 2019

Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers

Ari, quinze ans, est un adolescent en colère, silencieux, dont le frère est en prison. Dante, lui, est un garçon expansif, drôle, sûr de lui. Ils n’ont a priori rien en commun. Pourtant ils nouent une profonde amitié, une de ces relations qui changent la vie à jamais… C’est donc l’un avec l’autre, et l’un pour l’autre, que les deux garçons vont partir en quête de leur identité et découvrir les secrets de l’univers.

J’ai lu Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers pour la première fois en 2015. J’avais adoré ce livre qui m’avait énormément touchée. Depuis, j’ai lu aussi L’insaisissable logique de ma vie toujours de Benjamin Alire Sáenz. Cet auteur est l’un de mes écrivains pour la jeunesse préféré. Il réussit à aborder des sujets graves avec une certaine tendresse et ses personnages sont attachants. Mais surtout, il écrit de façon intelligente. J’avoue que j’ai parfois un peu de mal avec le langage de cour d’école dans les romans pour ados. Benjamin Alire Sáenz s’adresse aux jeunes (et aux moins jeunes) avec un discours intelligent tout en restant ancré dans le quotidien de ce que ces adolescents peuvent vivre. Avec la sortie du second tome d’Aristote et Dante, et le film qui est en post-production, c’était le moment parfait pour le relire.

Aristote et Dante débute en 1987. C’est un vrai roman d’été, même s’il se déroule sur une plus longue période. C’est un livre plein de souvenirs pour moi, du temps où l’on passait nos vacances dehors (ou à la piscine). Ces moments d’insouciance et de questionnement, entre les amis, les petits emplois saisonniers, les jeux et la quête de soi-même. J’adore ce roman et je sais que je le relirai encore éventuellement.

Aristote rencontre Dante à la piscine, par une chaude journée d’été. Ari s’ennuie et il n’a pas d’amis. Dante lui apprendra à nager. Ils deviennent rapidement très proches. Aristote est un garçon en colère, qui parle peu, comme son père revenu de la guerre marqué par ce qu’il a vu.

« Le problème, c’est que ma vie était l’idée de quelqu’un d’autre. »

Leur relation n’est pas facile et Ari se pose énormément de questions. Surtout qu’il est le plus jeune de sa fratrie, avec un bon écart entre son frère et ses sœurs. Ari a d’ailleurs un frère en prison dont on ne parle pas. C’est un fantôme qui n’existe plus, il a été effacé de l’histoire familiale. Ari vit cette absence de relation de façon très pénible. C’est lui-même qui nous raconte son quotidien et son histoire. Il a quinze ans à l’été où il rencontre Dante.

« J’étais donc le fils d’un homme qui portait tout le Vietnam en lui. J’avais de quoi m’apitoyer sur mon sort. Et avoir quinze ans n’aidait pas. Parfois, je me disais qu’avois quinze ans était la pire tragédie qui soit. »

Dante est le fils d’un prof de littérature. C’est un garçon étrange, qui porte aussi un prénom particulier, comme Aristote. Il parle avec des mots qu’Ari ne comprend pas toujours et lit plein de classiques, qu’il finit par partager avec son ami, qui lui les partage avec son père. C’est leur façon de se parler, par livres interposés. Dante adore ses parents. Il partage une belle complicité avec son père. C’est un garçon sensible, qui pleure facilement, qui aime les oiseaux et les animaux (et veut les sauver).

Pendant l’année qui suivra, Aristote et Dante vont essayer de grandir tout en restant amis. Il y aura beaucoup d’événements et de changements dans leurs vies. Il y a aussi Legs, le chien d’Ari que les deux garçons adorent, et ce camion rouge qu’il apprend à conduire et avec lequel il va dans le désert, dans son endroit préféré, regarder les étoiles. Avec Dante, parfois.

Tous les deux, ils partagent quelque chose de si grand que ça changera toute leur vie. Ensemble, ils vont tenter de comprendre les secrets de l’univers.

J’aime définitivement énormément cet auteur. Cette relecture n’a fait que le confirmer. J’ai lu le livre en trois heures, d’une traite. Retrouver Aristote et Dante était un vrai plaisir. L’auteur a une façon de raconter qui me touche droit au cœur. Ses romans sont beaux, intelligents. Je ne peux que vous les conseiller. Chaque fois c’est un merveilleux moment de lecture!

Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers, Benjamin Alire Sáenz, éditions Pocket Jeunesse, 368 pages, 2015

Les falaises

V. vient d’apprendre que l’on a retrouvé le corps sans vie de sa mère, rejeté par le Saint-Laurent sur une plage de la Gaspésie, l’équivalent « du bout du monde ». Elle regagne là-bas, brusquement, sa maison natale, et se confectionne une « île » au milieu du salon venteux, lieu désigné pour découvrir et mieux effacer – ou la ramener – l’histoire des femmes de sa lignée à travers les journaux manuscrits de sa grand-mère. V. se voit prise dans sa lecture, incapable de s’en détacher. Sa seule échappatoire réside derrière le comptoir d’un bar au village, dans une chevelure rousse aérienne, et s’appelle Chloé.

Les falaises a été une très belle surprise. Je ne m’attendais pas à aimer autant ce roman et à trouver autant de plaisir à me replonger dedans chaque fois que je le reprenais. Ce fut une excellente lecture, vers laquelle je ne serais peut-être pas allée d’emblée, mais qui m’a vraiment séduite. L’auteure a une très belle plume.

Le roman commence alors que la narratrice vient de perdre sa mère. Son corps a été rejeté sur une plage en Gaspésie. Les circonstances et les rumeurs laissent entendre qu’elle a glissé, elle qui tentait toujours de fuir. La narratrice quitte donc la ville pour retrouver la maison familiale, un lieu chargé de souvenirs, parfois beaux, parfois douloureux. Elle y retrouve sa sœur et sa tante, avec qui elle tente de faire face aux événements. La perte, la colère, le deuil, l’incompréhension parfois, les souvenirs qui n’ont pas toujours été heureux. Avec sa mère, il y avait de bonnes journées et des journées vraiment très difficiles. Une famille particulière, une enfance qui l’a été tout autant.

« J’ai l’impression brûlante de découvrir l’histoire pour mieux l’effacer. Son histoire, mon histoire. Celle de tout ce qu’il y a eu avant nous. Je me surprends à chercher l’élément déclencheur. Ce qui l’a fait craquer, fendre sur toute la longueur. La brèche par laquelle la fin s’est infiltrée. »

En fouillant dans la maison, la narratrice y découvre les cahiers de sa grand-mère, une sorte de journal intime qui la guidera de la Gaspésie à l’Islande et lui permettra, d’une certaine façon, d’avancer. Il y a aussi sa rencontre avec Chloé, qui apporte un baume sur sa vie qu’elle ne comprend plus. Et sa tante qui a toujours été là, un peu comme un phare ou une bouée. Mais la narratrice doit tracer son propre chemin maintenant. 

« On ne peut pas faire confiance à ceux qui repartent toujours. »

Le roman s’étire du mois d’octobre au mois de mars. Une période de grands bouleversements pour la narratrice. J’ai aimé découvrir son histoire. L’écriture est belle, pleine de vent, de colère, de souvenirs. Les chapitres sont courts, entrecoupés de poèmes et d’extraits de journaux. On retrouve chez la narratrice cette ferveur de continuer, quand même, ou d’essayer au moins. Malgré la tristesse et la difficulté. Malgré le poids de l’héritage familial.

Un très beau roman sur le deuil, sur les liens entre les femmes et sur la force de la vie. Une histoire qui brosse des portraits de femmes survivantes. Une très agréable surprise que ce roman!

Les falaises, Virginie De Champlain, éditions Bibliothèque Québécoise, 184 pages, 2022

Après

Jamie n’est pas un enfant comme les autres : il a le pouvoir de parler avec les morts. Mais si ce don extraordinaire n’a pas de prix, il peut lui coûter cher. C’est ce que Jamie va découvrir lorsqu’une inspectrice de la police de New York lui demande son aide pour traquer un tueur qui menace de frapper… depuis sa tombe.

J’étais très intriguée par ce roman et j’avais bien hâte de le lire. Ça été une excellente lecture, j’ai dévoré le livre pratiquement d’une traite. Les pages défilaient très rapidement. C’est tout à fait le genre d’histoire dans laquelle on plonge pour ne plus vouloir en sortir.

Après, c’est l’histoire de Jamie. Il a maintenant vingt-deux ans et c’est lui qui nous raconte ce qu’il a vécu étant plus jeune. Ce roman, c’est l’histoire particulière de son enfance. Car Jamie a un pouvoir très spécial. Il peut voir les morts. Et leur parler. Sa première expérience est un véritable cauchemar. Il est encore petit et il perçoit des choses que personne d’autre ne peut voir. Mais c’est surtout quand il peut voir la femme de son voisin, qui vient de mourir, et qu’il peut résoudre facilement un petit mystère entourant la disparition d’objets, que sa mère commence à saisir l’ampleur du don de son fils. Elle tente de le protéger comme elle le peut, même si elle ne comprend pas tout ce qui se passe en lien avec le pouvoir de Jamie. Lorsqu’une inspectrice de police est au courant de ce don et qu’elle veut tester ce que Jamie peut faire, elle décide de l’utiliser pour l’aider à la résolution d’un crime, alors que le criminel est mort. Avec cette expérience, Jamie réalise alors que son don a un prix très élevé et pourrait bien lui coûter la vie.

« Les morts sont obligés de dire la vérité, ce qui tombe très bien quand on a besoin d’une réponse. N’empêche que la vérité peut être vraiment pourrie, je le répète. »

J’ai vraiment aimé cette histoire. Toute l’intrigue entourant le don de Jamie est fascinante. On veut en savoir plus et on tente d’imaginer ce que ce serait d’avoir ce don, qui est aussi une forme de malédiction, surtout chez un enfant aussi jeune. Le roman est aussi très intéressant surtout parce qu’au-delà du pouvoir de Jamie, on découvre à travers ce qu’il nous raconte sa vie et son enfance: son père qu’il n’a jamais connu, la vie avec sa mère qui est agent littéraire, leurs problèmes financiers, la copine de sa mère qu’il reverra à quelques reprises après leur séparation, son oncle qui vit dans une institution et perd la mémoire, l’amitié qu’il développe avec le vieux voisin et ancien professeur à la retraite. Mais surtout, sa vie avec ce don à la fois fabuleux et totalement terrifiant.

« On s’habitue aux choses prodigieuses, on finit par les tenir pour acquises. Et on a beau essayer de lutter, ça ne sert à rien. Le monde est plein de prodiges, voilà tout. »

L’histoire d’Après se déroule pendant toute l’enfance de Jamie jusqu’à l’adolescence. Il nous parle de ce qu’il voit, des événements qui se sont enchaînés et des choses effrayantes auxquelles il a dû faire face. On s’attache tout de suite à ce personnage, c’est un narrateur sympathique, gentil, qu’on imagine aisément. J’ai adoré le suivre dans cette aventure effrayante. Confronté à un monde qu’il ne soupçonnait pas, Jamie doit faire face à des choses qu’il ne pouvait sans doute même pas imaginer.

Un livre prenant et intrigant!

Après, Stephen King, éditions Albin Michel, 336 pages, 2021