Misery

MiseryMisery, c’est le nom de l’héroïne populaire qui a rapporté des millions de dollars au romancier Paul Sheldon. Après quoi il en a eu assez : il a fait mourir Misery pour écrire enfin le « vrai » roman dont il rêvait. Et puis il a suffi de quelques verres de trop et d’une route enneigée, dans un coin perdu… Lorsqu’il reprend conscience, il est allongé sur un lit, les jambes broyées dans l’accident. Sauvé par une femme, Annie. Une admiratrice fervente. Qui ne lui pardonne pas d’avoir tué Misery. Et le supplice va commencer.
Sans monstres ni fantômes, un Stephen King au sommet de sa puissance nous enferme ici dans le plus terrifiant huis clos qu’on puisse imaginer.

Lorsque j’étais enfant, je me rappelle que le film Misery passait à Super Écran. J’étais un peu trop jeune, mais je me souviens de certains passages du film, donc celui où une Kathy Bates terrifiante apparaissait au bout du lit de Paul avec son marteau. Cette scène me terrifiait. Je réalise cependant que je n’ai jamais vu le film en entier.

Même si je connais quand même un peu l’histoire de ce classique du King, j’avais très envie de le lire. Je regarde la série Castle Rock et j’en suis à la seconde saison, qui est une sorte d’hommage à Misery. Avant de la visionner, je voulais lire le roman. Je me disais que l’occasion était belle de me plonger dans le livre!

Chaque fois que je lis un Stephen King, je suis impressionnée. Il réussit à nous amener avec lui dans n’importe quelle histoire. C’est toujours prenant, suffisamment descriptif pour nous donner l’impression de bien connaître les personnages (même si c’est un aspect qui est parfois reproché au King – trop de descriptions – moi j’adore!) et addictif. Il est difficile de refermer ce roman tant on veut savoir ce qu’il adviendra de Paul, d’Annie et même de Misery, le personnage de son roman.

Misery est le nom du personnage créé par Paul Sheldon. Il en a écrit toute une série très populaire auprès du lectorat féminin. Pour Paul, Misery est un personnage dont il souhaite se débarrasser pour écrire son vrai grand roman. Il souhaite la reconnaissance littéraire. Un peu comme Conan Doyle avec Sherlock Holmes (dont King parle d’ailleurs dans son roman). Quand il a un grave accident de la route, il est sauvé par Annie Wilkes, sa « fan numéro 1 ». Elle n’a pas encore lu le tout dernier Misery, ce qu’elle fait en prenant « soin » de Paul Sheldon. C’est alors qu’elle découvre que son écrivain préféré a tué son héroïne préférée. Il n’en faut pas plus pour qu’Annie pète les plombs. Et c’est le cas de le dire.

Pendant le confinement, j’ai souvent entendu parler de Misery avec une pointe d’humour, comme quoi il s’agit d’un grand roman de confinement. Effectivement, il est difficile d’être plus confiné que Paul Sheldon dont l’univers ne tourne qu’autour d’une chambre. Avec une menace qui plane continuellement au-dessus de sa tête, selon l’humeur très fluctuante de sa soignante.

Au-delà des scènes d’horreur où Annie s’occupe de Paul, on découvre au fil des pages un personnage à la fois fascinant et horrifiant. Annie Wilkes est un être complètement perturbé. Elle est folle à lier, psychotique et possède une perception de la vie très spéciale. Le roman dévoile beaucoup de choses inquiétantes sur la geôlière de Paul. La lecture en est donc terrifiante et encore plus prenante.

« Il s’étendit de nouveau, les yeux au plafond, écoutant le vent. Il se trouvait près du sommet du col, de la ligne de partage des eaux, au cœur de l’hiver, en compagnie d’une femme qui n’était pas très bien dans sa tête, une femme qui l’avait nourri par intraveineuse pendant qu’il était inconscient, une femme qui disposait apparemment d’une inépuisable réserve de médicaments, une femme qui n’avait dit à personne qu’il avait échoué ici. »

Au-delà de l’intrigue, de l’histoire d’horreur, il y a une réflexion intéressante sur le travail d’écrivain et sur la place que peut prendre un personnage, tant pour celui qui l’a créé, que pour les fans qui en veulent toujours plus. Il aborde aussi la mort d’un personnage de fiction, ses répercussions sur l’écrivain et sur les fans. L’histoire de Misery en est un excellent exemple. Il est fascinant de voir qu’un personnage que Paul a créé est à la fois à l’origine de sa lassitude, deviendra sa plus grande torture, mais aussi sa planche de salut.

Ici, Misery apparaît comme une entrave au « vrai » travail de l’écrivain. Un boulet que Paul doit traîner avec lui. Il devra y revenir et son sentiment face à son personnage évoluera au fil du temps et de ce qu’il est en train de vivre. Cette construction du roman et la réflexion qui se cache derrière m’a beaucoup plu. À chercher à fuir son personnage, l’écrivain se trouve forcé de « vivre avec elle » en permanence, en l’ayant constamment en tête.

« Ce n’était pas dans son habitude de peiner aussi laborieusement, ni de remplir la corbeille à papier de feuilles chiffonnées inachevées […] Il avait attribué cela à la douleur et au fait d’être dans une situation où il n’écrivait pas seulement pour gagner sa vie – mais pour ne pas la perdre. »

Pendant l’écriture forcée de Paul, Annie lui procure une vieille machine à écrire. Elle la lui apporte avec fierté, alors que la machine a déjà perdu son « n » au passage. Paul entreprend donc d’écrire sous la contrainte et le texte qu’il élabore apparaît sous nos yeux avec une police d’écriture rappelant celle d’une vieille machine à écrire. La lettre manquante étant ajoutée « à la main ». D’autres lettres disparaîtront au fil du temps et l’on retrouve cette police d’écriture modifiée au fil des pages. On peut donc lire des passages du roman de Paul avec les lettres manquantes. Ça donne à Paul un petit côté « réel » et encore plus puissant.

Comme bien souvent, on retrouve aussi une référence à une autre oeuvre de King dans ce roman. Ici, il est fait mention de l’hôtel Overlook et d’un gérant un peu cinglé… Ces clins d’œil me font toujours sourire quand je les découvre. Il y en a bien souvent dans les romans de Stephen King, un peu comme les caméos qu’il fait dans les adaptations de ses propres œuvres au cinéma ou en série.

Misery est un roman fascinant, par son exploration du processus de création. Les circonstances, ici, en font un roman terrifiant. J’ai vraiment passé un excellent moment avec ce livre. J’avais une petite panne de lecture et j’avais de la difficulté à me plonger dans quelque chose. Je me suis dit qu’un King arrangerait tout. Ce fut le cas! J’ai bien envie de voir le film maintenant, où Kathy Bates avait remporté un Oscar à l’époque pour sa prestation. Ça promet!

Misery, Stephen King, Le livre de poche, 391 pages, 2002

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5 réflexions sur “Misery

  1. Pingback: L’automne du King | Mon coussin de lecture

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